Je pense qu'il y avait deux sortes de pélicans : les pélicans blancs et les pélicans frisés. Nous avions déjà vu des pélicans : au Pérou, dans les îles Ballestas (le pélican thage)

au Costa Rica (le pélican brun).

Ceux-ci sont plus grands et plus blancs. Ils sont souvent représentés en bas-reliefs (au Pérou, à Chan Chan, civilisation chimù),

dans les églises romanes (pélican nourrissant ses petits)

Il y a en tout 8 espèces de pélicans dans le monde.

Le pélican blanc (pelecanus onocratulus) a une envergure de 180 cm, une tache rose autour de l'œil, des pattes roses, des rémiges noires. La moitié de la population européenne de pélicans blancs se trouve dans le delta du Danube (17000 couples en 2016). On en trouve d'autres dans le lac Prespa près du lac d'Ohrid. Les verrons-nous ?

Le pélican frisé (pelicanus crispus) est le plus grand des pélicans, trois mètres d'envergure. Il a les pattes grises, des plumes plus longues et frisées, un œil sans tache (sauf en période de reproduction). Il y en a aussi dans le petit lac Prespa (au sud du grand).

 

les blancs :

les frisés :

Allégorie du Pélican Alfred de Musset

 

LA MUSE

 

Quel que soit le souci que ta jeunesse endure,

 

Laisse-la s'élargir, cette sainte blessure

 

Que les séraphins noirs t'ont faite au fond du cœur;

 

Rien ne nous rend si grands qu'une grande douleur.

 

Mais, pour en être atteint, ne crois pas, ô poète,

 

Que ta voix ici-bas doive rester muette.

 

Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,

 

Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots.

 

Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,

 

Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,

 

Ses petits affamés courent sur le rivage

 

En le voyant au loin s'abattre sur les eaux.

 

Déjà, croyant saisir et partager leur proie,

 

Ils courent à leur père avec des cris de joie

 

En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux.

 

Lui, gagnant à pas lent une roche élevée,

 

De son aile pendante abritant sa couvée,

 

Pêcheur mélancolique, il regarde les cieux.

 

Le sang coule à longs flots de sa poitrine ouverte;

 

En vain il a des mers fouillé la profondeur;

 

L'océan était vide et la plage déserte;

 

Pour toute nourriture il apporte son cœur.

 

Sombre et silencieux, étendu sur la pierre,

 

Partageant à ses fils ses entrailles de père,

 

Dans son amour sublime il berce sa douleur;

 

Et, regardant couler sa sanglante mamelle,

 

Sur son festin de mort il s'affaisse et chancelle,

 

Ivre de volupté, de tendresse et d'horreur.

 

Mais parfois, au milieu du divin sacrifice,

 

Fatigué de mourir dans un trop long supplice,

 

Il craint que ses enfants ne le laissent vivant;

 

Alors il se soulève, ouvre son aile au vent,

 

Et, se frappant le cœur avec un cri sauvage,

 

Il pousse dans la nuit un si funèbre adieu,

 

Que les oiseaux des mers désertent le rivage,

 

Et que le voyageur attardé sur la plage,

 

Sentant passer la mort se recommande à Dieu.

 

Poète, c'est ainsi que font les grands poètes.

 

Ils laissent s'égayer ceux qui vivent un temps;

 

Mais les festins humains qu'ils servent à leurs fêtes

 

Ressemblent la plupart à ceux des pélicans.

 

Quand ils parlent ainsi d'espérances trompées,

 

De tristesse et d'oubli, d'amour et de malheur,

 

Ce n'est pas un concert à dilater le cœur ;

 

Leurs déclamations sont comme des épées :

 

Elles tracent dans l'air un cercle éblouissant;

 

Mais il y pend toujours quelques gouttes de sang

 

 

Je ne sais pas s'il s'agit de sternes pierregarin dites hirondelles de mer, ou les sternes arctiques... Les sternes pierregarin ont le bec orange avec le bout noir, ce qui n'est pas le cas ici. ces sternes-là doivent être des sternes à joues blanches.

Heureusement que les objectifs ont un fort zoom, il ne faut pas trop s'approcher...

à qui sont ces œufs ? cormorans ? albatros ?

mauves

potentille rampante

 

phragmites qui ondulent sous le vent ou au passage des bateaux.

 

olivier de Bohème

 

tamaris

 

 

Samedi 10 juin

 

 

Une belle journée s’annonce : il fera 29°. Nous montons dans des barques rapides (8 ou 9 par barque) et nous partons en direction de la mer Noire, à Sulina, à 30 km de Crișan. Nous allons faire des détours dans les canaux et nous arrêter longuement pour regarder les oiseaux. Le bateau est couvert mais ouvert sur les côtés. On peut aussi aller à l’avant pour la prise de photos.

 

 

 

 

C’est le plus grand delta d’Europe.

 

Le Danube parcourt 2850 km depuis sa source en Forêt-Noire et traverse dix pays (Allemagne, Autriche, Slovaquie, Hongrie, Croatie, Serbie, Bulgarie et Roumanie à qui il sert de frontière, Moldavie et Ukraine. À Tulcea, le Danube se sépare en trois bras principaux qui se jettent dans la mer Noire. Nous sommes dans le bras central du delta, le plus court. Nous ferons des détours par des bras secondaires, au sud du bras Sulina, là où il y a de nombreux lacs.

 

 

des îles

 

Dans le delta, il y a des îles flottantes, 400 lacs, 130 espèces de poissons, 1800 espèces de plantes, 300 espèces d’oiseaux... Le delta est au carrefour des routes migratoires (6 au printemps et 5 en automne). Le delta dépose 63 millions de tonnes d’alluvions par an. Ce territoire est en transformation permanente.

 

Au XIX è siècle, le phare de Sulina se trouvait près de la mer, maintenant il est à 5 ou 6 km.

 

 

 

La Commission Européenne du Danube a été créée en 1856 (voir plus bas, avec les explications sur le phare), remplacée en 1948 par la Commission actuelle (11 états-membres plus 4 états observateurs). Elle a pour mission de régler la navigation sur le Danube.

 

 

 

Obélisque commémorant la création en 1894 (sous Carol I) d’un petit canal destiné à éviter les méandres du bras de Sulina afin de faciliter la navigation des gros bateaux.

 

 

Les gens pêchent dans des barques (lotcas).

 

On prend un canal à gauche

 

des cabanes à toit de chaume, sans doute celles des pêcheurs lipovènes

 

 

cabanes datant des années 80, construites par les communistes pour les jeunes.

 

 

 

Nous arrivons à Sulina, petit port qui a connu son heure de gloire. Le port était exempté de taxes douanières. Mais il semble que les élégants bâtiments du début du XX è siècle ne soient plus qu’un souvenir. Pour aller du restaurant Le Pescarilor à la plage, nous avons marché en plein soleil, sur une jetée sablonneuse, aride, bordée de bâtiments plus ou moins délabrés, voire démolis, en faisant attention à ne pas marcher sur la queue des chiens errants. Après la beauté du delta, cette promenade m’a semblé décevante et m’a fatiguée.

 

 

 

 

Comme l’indique l’inscription sur le phare, des digues et ce phare ont été construits en 1856 par la Commission européenne (instituée par le Traité de Paris marquant la fin de le guerre de Crimée) pour améliorer la navigabilité des embouchures du Danube, Les travaux ont été achevés en 1870.  Suivent les qualités des signataires pour les puissances alors représentées : Autriche-Hongrie, France, Prusse, Russie, Sardaigne et Italie (l’union n’étant alors pas parachevée) et la Turquie.

 

 

 

Nous faisons un arrêt au cimetière de Sulina. Il rend compte de cette mosaïque de peuples qui se sont installés là au gré des guerres et des traités : des Ukainiens, des Lipovènes (Vieux-Croyants, communauté russe orthodoxe conservatrice), Grecs, Anglais, Juifs, Turcs, Tatars… Les tombes sont regroupées en quatre quartiers selon les religions (turc, hébreu, lipovène et tous les autres).

 

 

Au XVIII è siècle, Sulina était un repaire de pirates grecs et maltais, c’est pourquoi nous voyons la tombe du pirate Gheorghios Kontoguris (né à Céphalonie le 14/10/1828 et mort le 25 mars 1871son frère Grigorios a placé cette plaque),.

 

 

Il y a aussi des tombes de marins anglais et employés par la Commission du Danube, la tombe d’un croate (Perusko), d’un italien (Luca Sessa), et même de la princesse Catherine Moruzi (petite-fille du boyard moldave Ioan Sturdza). Des tombes racontent des drames : celle d’Izabella John Robinson qui venait voir son fiancé et dont le bateau a fait naufrage. On ne put la sauver car, dit-on, sa crinoline l’entraînait vers le fond. Deux tombes côte à côte racontent une histoire touchante : William Webster, officier anglais sur le bateau Adalia, et Margaret Ann Pringle étaient amoureux mais il semble que le mariage ne pouvait pas se faire. Elle s’est déguisée en marin pour suivre son amoureux sur le bateau. Le 21 mai 1868, elle est tombée à l’eau, il a voulu la sauver mais ils se sont noyés tous les deux. Il avait 25 ans et elle 23.

 

 

J’ai pris peu de photos de ce cimetière, la fatigue sans doute !!!!

 

 

 

Nous arrivons enfin à la mer Noire. Un petit rafraîchissement au bar de la plage, et on repart !

 

 

 

Nous rentrons à l’hôtel vers 18 h 30 pour prendre un délicieux repas de poissons.

quelques oiseaux vus ce jour-là :

les goélands

cormorans

les grèbes huppés

canards

 

aigrette garzette

aigrette et héron

ibis falcinelle. (les Roumains les appellent « petits gitans »). Le plumage est roux foncé.

 

 

vaches grises des steppes adaptées à ce milieu, dentition spéciale pour l’herbe dure, ne donnent pas beaucoup de lait, passent l’été ici, toutes seules

 

 

d'autres photos, sternes, pélicans dans les articles suivants...

 

 

 

 

Vendredi 9 juin

 

Il fera chaud : 29°

Nous sommes en Valachie : à l’ouest c’est l’Oltenie (que nous ne visiterons pas) et à l’est la Dobrogée (région du delta du Danube) où nous passerons deux nuits. Nous allons parcourir 300 km de Sinaia à Crișan.

 

En Dobrogée, la population musulmane est importante et il y a de nombreuses mosquées.

 

Nous traversons des petites villes, Campina, Ploiești, Uziceni, avec seulement quelques arrêts dans des stations-service.

 

Le ciel est bleu, quelques nuages blancs s’effilochent ça et là. Les champs de blés sont parsemés de coquelicots et de fleurs violettes que je prends pour des sauges mais qui sont sans doute des pieds-d’alouettes.

 

Nous déjeunons en terrasse au restaurant La Costa à Slobozia. Plusieurs villes roumaines portent ce nom, ce qui correspond en France à « Villefranche » car la ville était exemptée de taxes (slobod = gratuit). Un magnat mégalomane a construit dans cette ville une Tour Eiffel et un ranch inspiré de la série Dallas. Condamné pour corruption, il a abandonné son domaine et la Tour Eiffel rouille peu à peu.

 

Notre repas est composé, comme souvent, de soupe de polenta, poulet en sauce et légumes, gâteau marbré. À l’intérieur du restaurant a lieu une cérémonie religieuse avec buffet. Tout va bien, hélas tout-à-coup, Mircea nous annonce que nous allons devoir patienter avant de reprendre le car. En effet, la porte du milieu ne ferme plus. Mircea et Vali essaient de réparer, sans succès. Un nouveau bus devrait venir nous chercher, mais Bucarest est loin et il faut attendre. Nous occupons notre temps à boire des boissons fraîches, à nous promener dans le parc voisin, pas trop loin quand même, pour être prêts à remonter dans le bus. Trois heures et demie plus tard, nous repartons, dans notre bus, la porte a été maintenue par des sangles.

 

 Nous arrivons à Hârsova, au bord du Danube. La légende dit que les habitants de la cité se seraient habillés en ours pour faire peur aux Ottomans. Le pacha se serait écrié « voilà les ours »

 

Il y a des champs d’éoliennes qui fournissent 15 % de l’énergie nationale.

 

 Les chardons au bord de la route me font penser au roman de Panaït Istrati « Les chardons du Baragan ». Nous traversons effectivement cette région où se déroule l’action du roman, qui raconte l’exode rural et la pauvreté au début du XX è siècle. C’est également dans cette région que de nombreuses personnes furent déportées dans des conditions extrêmement difficiles, entre 1940 et 1989 sous les régimes fasciste et communiste : résistants, juifs, intellectuels, Lipovènes (Vieux-croyants).

 

Nous arrivons enfin à Tulcea, ville portuaire (réfrigération du poisson), touristique (départ pour les excursions dans le Delta) et industrielle (combinat de bauxite).

 

Nous laissons nos valises à l’hôtel Delta pour ne garder qu’un sac à dos avec le change pour deux nuits. Comme d’habitude, j’ai du mal à descendre (et encore plus à en sortir!) dans ces petites barques rapides.

 

Nous mettons une heure pour parcourir les 50 km qui nous séparent de notre hôtel, la pension Eden, à Crișan. Les goélands et les mouettes sont nombreux. À la surface, des petits insectes volent. Des moustiques ? Heureusement non, ce sont des milliers d’éphémères (Palingenia longicauda) que les Roumains appellent « les pentecôtes ». Certains s’affalent au fond de la barque, on les relâche.

 

 

L’hôtel est charmant. Une vieille barque (lotca) est échouée sur la pelouse. Je profite de cette petite heure de temps libre avant le repas pour la dessiner de tous les côtés.

 

Nous n’avons rien visité pendant cette journée mais le podomètre indique quand même 23 500 p